Les fidèles du Boukornine

mercredi 23 juillet 2008

L’unique « Prince » du quartier



L’ambiance singulière qui régnait dans notre quartier, je n’ai jamais pu la retrouver ailleurs.

Un mélange détonnant de laisser-aller, de détente, de frayeurs et de sourires.

Vers trois heures du matin, toute la bande (environ une cinquantaine de personnes) se retrouvait assise soit sur ces barrières qu’on venait nous affliger en début d’été, soit sur ces blocs de pierre qui bordaient la corniche hammamlifoise.

Il y avait de la provocation dans l’air. On savait tous que sous peu, Prince, le berger belge au taillage impressionnant allait faire surface.

En effet, Seif le maître de cette bête, le sortait se promener tous les jours pratiquement à cette même heure.

On attendait tous.

Jusqu’à ce que ce fauve de couleur noire apparaisse au loin et alors, les plus lâches fuyaient déjà de peur de se voir dévorer.

Pour les autres c’était une partie de plaisir unique.

C’était en quelque sorte notre corrida typiquement hammamlifoise.

Quand Prince se mettait à nous courir après, sous les « Attaque ! » incessants de Seif, l’instinct de survie des fous que nous étions ressurgissait.

Certains se jetaient dans l’eau (ce qui réservait parfois de mauvaises surprises aux baigneurs nocturnes du genre bris de verre dans la plante des pieds…) D’autres s’introduisaient dans tous les édifices qui nous entouraient sans se soucier des propriétaires qui sortaient souvent pour nous injurier.

Malgré tous les efforts, bien des fois, il était déjà trop tard.

Je connais un nombre tellement important de personnes qui ont été mordu par ce chien féroce. Mais toujours, avec ce fair-play exemplaire, les victimes se gardaient d’aller porter plainte avec parfois il faut dire quelques manœuvres de « Khaltek Cherifa » la mère de Seïf qui avait pour coutume de venir supplier tous les matins les proies de la veille pour ne casser aucun maillon de cette chaîne alimentaire.

Un jour, la municipalité a décidé d’agir. Ils avaient entendu parler de cette bête sanguinaire qui sévissait impunément depuis trop longtemps dans notre quartier. Mais curieusement, un élan de solidarité sans précédent empêcha ces forces d’en finir avec Prince.

Jusqu’au jour où la nouvelle nous est tombée dessus, fracassant tous nos souvenirs et nos espoirs de voir se perpétuer cette tradition inestimable : On a volé Prince !

Mais qui a osé le faire ?

A-t-on idée d’enlever une bête aussi indocile ?

Aujourd’hui le quartier est tristement habillé d’un silence lugubre. Les aventuriers d’hier ont désormais déserté le coin qui nous était propre préférant d’exploiter d’autres créneaux plus générateurs de pics d’adrénaline.

4 commentaires:

Mourad a dit…

un plaisir que je ne comprendrai jamais et qui est apparemment typiquement hammamlifois. ce prince "des ténèbres" (car il ne peut pas en
être autrement) rien qu'à ta description je ne veux pas m'approcher à moins de 100 mètres de lui. Oui je sais, ma bravoure est le trait de mon caractère que j'affectionne le plus. d'un autre côté, je suis trop attaché à la vie pour me mettre de telles aventures

Anonyme a dit…

Ce prince m'empechait de dormir moi qui me levais au aurore. Mais entre nous depuis 2 ans ce cher prince n'apparait plus, je me demande ce qu'il est advenu, je sais que son habitait pas très loin mais reste à savoir s'il lui aussi n'a pas déménagé aussi.

Khalil a dit…

----> Mourad
Ce plaisir là, seuls les gens qui y ont goûté peuvent te répondre sur l'ampleur du phénomène.
Tu devrais pourtant essayer, tu ne sais pas ce que tu rates.
Je te laisse encore 10 secondes pour réfléchir.
Profites-en!
----> Kikitou
Le chien a été volé Kikitou!
Tu n'as pas lu la fin de l'article ? :)
Imagines comment cette bête féroce a été volée ?!
Sobhana allah...

Anonyme a dit…

En effet khalil j'ai mal lu la fin de ton récit, une chose est sure est que même si on a volé Prince, le quartier reste bruyant vu que nous avons recruté un autre chien blanc cette fois ci, et qui adore aboyer au moment de la prière je dirai même qu'il hurle, chose qui me laisse des fois perplexe.