Les fidèles du Boukornine

lundi 21 mars 2011

Le faux débat sur la laïcité


Les débats d'après 14 janvier sont comme une fripe, on y trouve de tout mais surtout de la camelote.
Alors, dans cette friperie idéologique on est parfois tenté de raccrocher, de devenir apolitique et de faire de la situation actuelle du football tunisien sa plus grande préoccupation.

Cependant, parfois, la nostalgie de l'époque où l'on débattait de tout sans aucune peur ni aucune vergogne refait surface et nous revoilà.

La scène politique et sociale en Tunisie est actuellement secouée et très divisée sur un interminable débat autour de la laïcité.
Rien de plus légitime, me diriez-vous ? Ou encore, c'est un indicateur de bonne santé sociale si le peuple se met à réfléchir et à prendre position ?
Peut-être, oui... Mais le problème c'est que ça vole très bas coté arguments et les gens ne maitrisent aucunement la question.

Par ailleurs, des manifestations pour la laïcité sont sévèrement réprimées par d'autres manifestants qui jugent cette prise de position blasphématoire, des femmes sont traitées de trainées pour peu qu'elles aient manifesté, des gens sont agressés au nom de l'islam et Dieu sait combien il en est innocent et des vidéos circulent sur le net affichant des personnes qui ridiculisent les laïques avec un humour digne d'un écolier en cour de récréation.

Je ne vous cache pas que je suis pour la laïcité et que je ne perçois aucune autre voie du salut pour notre nation que sous un gouvernement laïque.
Maintenant, essayons de comprendre le sens de la laïcité dans le calme et loin de ce climat  de chasse aux apostats. Nous sommes des gens supposés civilisés, Bon Dieu !
Commençons alors par dépassionner le débat.

La laïcité veut dire séparation entre autorité religieuse et état dans la gouvernance d'un pays et ne désigne en aucun cas l'athéisme. Je suis musulman et je trouve que l'islam si pur et si spirituel n'a pas à se prostituer dans un milieu répugnant comme la politique.  La compréhension de ce principe est essentielle pour le reste du débat. Parce que si tu me taxes de renégat au premier désaccord, il est clair que tu es loin de m'accorder le respect minimum nécessaire pour une discussion civilisée.

Je défend farouchement cette position vu que les exemples dans l'histoire d'ingérence des religieux dans les affaires de l'état se sont tous soldés par un échec cuisant ,une décadence à n'en plus finir et une réduction franche et affligeante de l'espace des libertés individuelles.

Où sont les revendications des anti-laïcité ?  Garder l'islam comme religion de l'état tunisien dans le premier article de la constitution. Bien sûr !
Ceci est un fondement de la constitution. Beji Caïd Sebsi a même qualifié ce point de "ligne rouge à ne pas franchir".

Où est le problème alors ? Appliquer la chariâa ?
Tu veux qu'on coupe les mains aux voleurs avec une taille à la coupe proportionnelle à la gravité du vol ? Qu'on décapite les assassins en pleine place publique sous l'étendard du Qasas ? Tu veux qu'on lapide à mort les femmes adultères en prenant soin de choisir une taille moyenne pour les pierres pour faire le plus mal sans tuer trop rapidement ?

Il faut garantir les libertés individuelles dans cette patrie connue depuis des millénaires pour sa tolérance à toute épreuve. C'est un énorme bond en arrière que de fermer les maisons closes. Ce serait un acte d'autant plus liberticide si on empêchait les gens de se bourrer la gueule dignement.
Le code du statut personnel est sacré pour moi et pour tous les tunisiens qui savent respecter l'histoire de cette nation. C'est une fierté nationale, un acquis considérable que nous envient tous les autres pays plus ou moyens ouvertement. Le Maroc par exemple bataille jusqu'à ce jour pour essayer de garantir le dixième des libertés dont jouit la femme tunisienne depuis le 13 aout 1956.

Pour garantir les libertés individuelles et contrecarrer les courants salafistes qui fantasment sur une Tunisie "talibanesque" nous nous devons de protéger la laïcité.

Je vois que concernant l'application de la laïcité, les rumeurs vont bon train.
Les horaires spéciaux au cours du mois de ramadan seront maintenus.
Les fêtes religieuses seront encore et toujours fériées comme c'est le cas en France vu qu'ici bas, l'islam est la religion de majorité écrasante.
L'éducation islamique sera encore et toujours enseignée. 
La femme pourra à souhait porter un hijab ou un string (ou les deux à la fois) sans être inquiétée pour autant.

En gros, arrêtons de diaboliser les laïques en dépeignant des ivrognes libertins athées et irrespectueux des mœurs et coutumes. C'est trop caricatural et le peuple tunisien est intelligent pour croire à ces niaiseries.
La Tunisie est un pays musulman certes mais la laïcité est un principe qui est là pour être érigé comme rempart à l'obscurantisme et aux éventuels aléas de notre jeune expérience démocratique.

Je ne trouve pas que cette dualité d'un état laïque dont la religion est l'islam est de l'ordre de la schizophrénie, loin de là. Les deux principes peuvent très bien s'épouser et cohabiter en toute harmonie.

Mon frère quand tu diffères de moi, que tu te prosternes pour Allah, Dieu ou le néant c'est un choix personnel et je ne te jugerais jamais pour tes orientations religieuses. Mon frère si tu bois de l'eau minérale, ou de l'alcool, que tu fais vœux de chasteté ou que tu fais de tes organes génitaux un fond de commerce, loin de me léser et parfois loin de m'enrichir (contrairement au petit prince) tu m'en vois souvent indifférent
Mais bien heureux de voir que tu peux exister avec la manière qui te chante sans craindre pour ta vie, pour ta dignité ou pour ton intégrité physique.

Pourquoi maintenant parler de faux débat ?
Tout simplement parce que si les deux parties s'attablaient et discutaient dans le calme et la sérénité je suis sûr qu'au lieu de la violence dont ils font preuve actuellement, ils en sortiraient avec beaucoup d'amour, de compréhension et d'accord dans le respect mutuel.


A bon entendeur !


P.S: Je m'excuse si l'organisation de ce texte est quelque peu anarchique. Je suis dans un piteux état. Cloué au lit depuis deux jours.

dimanche 20 mars 2011

20 mars, plus que des cigarettes, une date qui fait un tabac !


Fut un temps où le dictateur déchu passait sous silence une partie incontournable  de notre histoire contemporaine, je cite par exemple la date de la proclamation de l'indépendance de la Tunisie, le 20 mars 1956.

Nous avions pourtant droit, pour fêter le 7 novembre, le jour du "changement béni" à une semaine fériée pour les élèves et étudiants, deux jours pour les travailleurs. Les drapeaux étaient placés partout dans les rues, et toutes les artères de la  Tunisie, on dépensait sans compter pour nous dire que nous devions nous réjouir d'avoir un dictateur à la tête du pouvoir.
Les livres d'histoire concentraient tous leurs efforts sur l'après-87 et occultaientt d'une façon très méprisable  10.000 milles ans d'histoire c'est à dire de l'époque Capsienne, qui se situait, tenez vous bien, au VIIIème millénaire avant JC.

Cela dit, on nous soulait avec les accomplissements du messie venu nous délivrer de l'épouvantable courant islamiste, dans la rue, dans les livres, dans les médias, dans l'art, dans le sport et quand on dormait.
Le message subliminal de la 25ème image voulait nous transmettre que Ben Ali était le père fondateur de la Tunisie moderne.

Je ne vous cache pas que je déprimais pendant les vacances du 7 novembre et surtout quand je voyais qu'on essayait, pour se rapprocher du sultan, de cracher sur l'histoire et de faire d'une date historique telle que le 20 mars, un jour férié anodin où les drapeaux tunisiens n'avaient même pas le droit d'être hissés de peur que le tunisien ne soit pris d'un élan de dignité et d'orgueil et ne se lève enfin pour réclamer son dû et sa liberté violée.

C'était bien sûr, sans compter sur les principes sur lesquels cette jeunesse en jeans taille basse et gavée aux yaourts à boire a été élevée.

Hier en passant devant le siège de la télévision nationale, j'ai été étonné de voir qu'on avait accroché des dizaines de drapeaux de notre chère patrie tout autour. J'en avais les larmes aux yeux.

Le 14 janvier est pour nous une deuxième indépendance. Nous nous sommes d'abord débarrassés de l'occupation puis de la dictature, il reste certes, une culture dictatoriale à déraciner. Mais le fait est là que nous sommes libres de fêter notre 20 mars.
Bonne fête à tous !

Pour finir, j'exige que la régie nationale des tabacs et des allumettes rebaptise définitivement sa marque de cigarettes phare: 20 Mars international.
Une date aussi importante de notre histoire n'est pas à vendre encore moins quand il s'agit de produit destiné à tuer des gens à coups notamment de cancers bronchopulmonaires...

dimanche 13 mars 2011

Contre le lynchage et pour une justice digne







J'ai été choqué par les images diffusées au JT de la chaine nationale tunisienne à propos de l'inculpation des trois hommes forts du régime déchu. 
Bien sûr je ne porte aucun d'entre eux dans mon cœur mais ce n'est pas en les lynchant qu'on se vengera. 

Ce qui est bizarre, c'est que même les avocats s'y mettent et chacun y va de sa touche personnelle de bassesse pour que le lendemain les simples d'esprit retiennent son nom et viennent le consulter pour leurs affaires. Quel honneur y a-t-il, messieurs les avocats et ô grand peuple de Tunisie à insulter une personne entre les mains d'une justice qu'on veut indépendante ? 
Faire pression pour que la sentence soit la plus sévère possible ? 

J'ai demandé au sang des martyrs de la dignité et ce dernier m'a répondu que c'est pour bâtir un état de droit qu'il a coulé à flot pendant un mois et qu'il hante encore à ce jour les bourreaux d'un peuple opprimé pendant des décennies.

Je fais confiance à notre justice. J'attendrai que cette dernière fasse son boulot en respectant le déroulement de toutes les procédures. 
Quant à TTN, notre chaîne nationale, je tiens à préciser que je l'admire profondément... Même en voulant bien faire, couvrir de façon objective et supprimer la censure, ils arrivent quand-même à être médiocres.
Je pense qu'ils n'auraient pas dû diffuser de telles images par pudeur... 



samedi 12 mars 2011

10 ou 5 ans d'indignité nationale pour les RCDistes !


Le peuple tunisien a fait sa révolution contre un despote et un régime policier étouffant.
Deux mois après, l'institution dictatoriale par excellence, celui qu'on appelait affectueusement "Le parti" (El 7ezb) est dégagé à la suite d'une procédure initiée par le ministre de l'intérieur Farhat Rajhi depuis quelques semaines.

Aujourd'hui, après la dissolution du RCD, je suis étonné de voir que des ex-RCDistes, et ne me dites pas qu'il ne faut pas mettre tout le monde dans le même sac, sont nommés tour à tour dans des postes de responsabilité, alors qu'il est tout à fait clair que le peuple, du moins les gens que je côtoie, n'a plus confiance en ces RCDistes qui savaient pertinemment en accédant à cette institution dictatoriale qu'ils allaient devenir complices du dictateur sanguinaire dans sa lutte acharnée pour faire mordre le poussière à son peuple et l'asservir jusqu'à ce que mort s'ensuive.

Alors qu'ils ne viennent pas nous chanter aujourd'hui qu'ils n'ont rien à voir avec lui et que ce sont des démocrates convaincus. On m'avait proposé à l'époque d'accéder au Réseau des Criminels Déchus contre un programme alléchant mais mes convictions m'en avaient formellement interdit même l'hésitation avant de décliner.

Jusque là rien de nouveau.

Par contre ce que je propose c'est de faire comme les français au décours de la deuxième guerre mondiale avec le crime de "l'indignité nationale" (Cliquez ici).
Tout simplement, toute personne ayant appartenu à cet organisme quasi terroriste que fut le RCD sera exclue de toute responsabilité politique pendant une durée de 5 ou 10 ans.
Parce que je suis rancunier et qu'il me faudra un peu de temps pour que je digère que des "citoyens" aient pu passer des années à se foutre de ma gueule dans l'unique but d'avoir des avantages sociaux considérables.

A noter que ce fut aussi le cas de certains "collabos" tunisiens du temps de l'indépendance dont je cite l'exemple de Mohammed Salah Mzali.

Maintenant, ce qu'il faut, c'est un élément légal. Une loi qui précise les personnes visées ( Tous les adhérents ou les responsables au sein du RCD seulement) et les peines encourues (Inéligibilité, exclusion des postes de responsabilité...)
Nous sommes dans une légalité mise en cause avec une constitution qui sera révisée et je le reconnais aussi, je ne suis pas apte à en discuter vu que je ne veux pas m'aventurer sur des terrains qui me sont pratiquement inconnus..

Je voudrais, cependant, lancer le débat sur ce sujet, surtout avec l'annonce d'un éventuel Kasbah 3 dés le 18 mars vu que les (ex) RCDistes sont toujours omniprésents notamment sur la scène politique avec une multitude de partis, des chefs de commune et des préfets dont tout le monde connait leur sombre passé de lèche botte...




mardi 8 mars 2011

Femme tunisienne, merci d'exister...

Je rends hommage ce soir à ces femmes tunisiennes qui ont su accoucher d'un peuple si séduisant si féérique.
Ces dames d'honneur et de courage qui ont toujours supporté leurs maris et leurs progénitures dans la conquête de leur dignité violée et martyrisée.

Je suis fier de vous mesdemoiselles et mesdames. Vous me comblez.

Je suis un amoureux, un passionné d’un seul sourire certes, d’un seul regard et d’une seule fossette mais c’est parce qu’en elle j’admire toute  la gent féminine.

J’aime les filles munies de leur gloss autant que les demoiselles armées de leur seuls courage et patience pour affronter les aléas de ce destin ridé.

J’ai une pensée particulière aux mères et aux sœurs de Bouzid, de Meknassi et de Menzel Bouzayene et puis de Théla, de Kasserine et d’ailleurs.
Ces dames qui ont dignement refusé les vingt milles dinars de dédommagement offerts par le gouvernement rappelant que rien ne pourra remplacer leurs enfants morts en martyrs pour la liberté et qu’elles ne troqueront jamais leur droit en une justice rendue pour quelques dinars aussi miséreuses soient-elles.

Mon esprit frémit aussi à l’évocation de cette femme tunisienne présente sur tous les fronts depuis que Bourguiba est venu l'émanciper (espérons que ce soit) à jamais des chaînes de l’obscurantisme.
Femme tunisienne, je t’aime. Je n’ai que mon cœur à t’offrir.

Tu accepteras je l’espère ma place dans ce bus étatique [à la peinture jaune esquintée par le poids de la dictature,] en guise de remerciement et de reconnaissance pour tes services rendus à la nation et je m’excuse au nom de tous les hommes de la terre pour tous les bleus qu’un XY ait pu causer à une si douce créature.

Femme tunisienne, pour faire court, et Dieu sait combien tu es occupée, merci infiniment d’exister !

mardi 1 mars 2011

"Dégoutage" au pays du jasmin

Plus envie d'écrire. Plus envie de sortir.
C'est officiel, je déprime pour mon pays.
J'ai été à la Kasbah tous les jours pour appeler Ghannouchi à s'en aller et à nous laisser continuer tranquillement notre révolution rebâtir notre Tunisie sur des bases solides.
Je n'étais pas d'accord sur d'autres revendications tel le régime parlementaire ou le conseil de protection de la révolution. Il me suffisait que Ghannouchi s'en aille et qu'une assemblée constituante soit élue.

Ghannouchi a démissionné, Caïd Sebsi a été nommé. Aussitôt, la Kasbah a crié "Dégage Caïd Sebsi"
En discutant avec des "Moâtasmine" de la Kasbah, j'ai eu un choc insurmontable.
Ils sont contre tout le monde. "On restera à la Kasbah, on paralysera tout le pays jusqu'à ce que nos revendications soient entendues. Le peuple a choisi et le gouvernement n'a d'autres choix que de suivre. Nous voulons un régime parlementaire et que le conseil de protection de la révolution soit adopté"
et sur la question du vandalisme du centre ville le weekend dernier, ce taré s'est interrogé: "Et pourquoi la police a tiré ? Ils n'en ont pas le droit ! C'est criminel !"

Je ne porte pas la police dans mon cœur, loin de là. Mais lors du weekend dernier, si j'étais policier, moi-même j'aurais tiré... C'était réellement de la légitime défense et je ne crois pas que les milliers de 16/17 ans qu'on a vu célébrer leur "victoire" sur la police soient tous des milices.

Je me suis retenu de l'étrangler. Je l'ai quand même corrigé ce con de bourgeois qui joue aux révolutionnaires.

Pour commencer, le régime parlementaire doit faire l'objet d'un référendum, si on veut vraiment suivre ce type de gouvernance.
Concernant le conseil de protection de la révolution, cette institution est illégitime. Moi, personnellement, elle ne me représente pas, pourquoi me l'imposer si elle est anticonstitutionnelle ?  La Kasbah c'est le peuple ? Mais le reste du peuple alors, on en fait quoi ?
J'ai toujours été du coté des gens de la Kasbah mais à ce moment de l'histoire je pense qu'ils n'ont plus rien à faire là et que leurs revendications n'ont pas lieu d'être vu qu'on ne peut pas imposer à toute une nation des décisions qui changeraient le cours de leurs vies sans qu'il n'y ait une véritable concertation de toutes les parties prenantes à savoir ce peuple en premier et dernier lieu.
Ce peuple tunisien mineur dans sa culture politique, qu'on détourne et qu'on retourne mille fois afin de l'utiliser comme tremplin. Ce peuple orphelin dont les porte-parole se comptent par millions s'exprimant à tort et à travers ponctuant leurs phrases haineuses scandées au nez des médias d'un air dédaigneux par un naturel: "au nom du peuple" ou un "le peuple veut..." et jamais un "Nous voulons..."
Laissez tranquille "le peuple"... Il se prononcera sur les questions essentielles en temps voulu après s'être éclairé sur les problèmes et les solutions.

Terminons tout de même sur une note positive.
On a certes volé des armes, fait cramer les commerces, battu des blogueurs et des journalistes pour avoir fait leur boulot, braqué des personnes sans défense et mis à mal notre économie.
On mord certes, la poussière mais demain de la poussière naîtra l'espoir et l'illumination et alors on croquera la vie à pleines dents et on respirera la liberté à pleins poumons.
Alors seulement, nous pourrons jouir de nos acquis et savourer notre triomphe.