Les fidèles du Boukornine

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dimanche 21 février 2010

Dieu créa le monde, mais le Moulinex c'était nous !

Il était une fois, dans une contrée perdue entre l’espace et le monde, des gens sympathiques, beaux et créatifs mais quelque peu oisifs par manque de moyens ou pour cause de trois fois rien de volonté et d’opiniâtreté.

Seul bémol dans cette vie agréable et seule point noir venu entacher le facies aux traits forts enviables de cette commune paisible : On n’y pouvait jurer de rien.

Personne ne sait qui est à l’origine de cet adage qu’on avait érigé en véritable règle de conduite immuable et au dessus des lois. Si seulement on pouvait le savoir, on se serait rué sur son corps grêle soit-il, ou volumineux, pour lui affliger les pires des châtiments…
L’émasculer en pleine place publique bondée de gens heureux d’être là, est une très charmante représentation et qui nous aurait ouvert les portes du paradis.

Mais le fait est là, quiconque était surpris en train de jurer de rien était passible d’une sanction exemplaire. Il y avait même une brigade spéciale improvisée au départ à cet effet mais qui a fini par prendre une ampleur considérable : La brigade de la juridiction ou Les Défenseurs de la Jurisprudence ou les Chevaliers de la Table des Jureurs Invétérés.

Cependant, comme plus c’est interdit, plus le pic d’adrénaline atteint des sommets, je me surprenais souvent émettant un discours révolté et enthousiaste afin de galvaniser un interlocuteur hésitant et à le pousser à jurer de rien, justement.

Rien n’y faisait. Ici bas, les gens respectent la loi. Même quand elle n’est que morale. Même quand elle n’est qu’orale, elle est sculptée au fort intérieur des mentalités pierreuses.

Le peuple se devait donc de jurer à tout bout de champ….
Sur la tête de leurs mères, de leurs grand-parents ou de leurs proches qui venaient de décéder ou qui souffraient depuis peu d’une maladie incurable.

Dieu aussi y passait : « wallah » !

Dieu en est témoin, je t’aime bien !
Peu importe si je rêvais secrètement de lui défoncer le crâne à coups de briques Boucetta « empruntées » au chantier du coin ou si j’aspirais à pousser le couple qu’il formait avec l’autre jolie princesse à la rupture par unique envie et haine gratuite….

L’important c’était purement de jurer, peu importe l’objet, pour ne pas tomber dans le pêché, l’opprobre, l’interdit et  se retrouver d’un coup marginalisé, haï et marqué au fer rouge (à jamais).

Un beau jour, j’étais arrivé, pour une fois, à convaincre un passant, sur qui j’avais catapulté en pleine figure une tirade argumentative inévitablement efficiente.

« On est dans un pays libre. On est né égaux en droits. Devant la loi, il ne devrait jamais y avoir d’approximations. Pourquoi les fils de telle ou telle autre personnalité se permettent-ils de ne jurer de rien ? Vaut mieux pourrir en prison tout en étant libre d’esprit que de vivre une vie atone, terne faite de sempiternels hochements de tête…
[…] Vis ta vie, cher ami ! Demain, tes enfants se plairont à raconter à leurs petits enfants : Mon père y était, dans ce mouvement précurseur et internationalement reconnu… L’histoire retiendra ton nom…
[…] »

Je ne croyais même pas en ce que je disais… Dignité, honneur, liberté et justice… Ce sont des mots littéraires, romanesques, historiques et qui de ce fait ne doivent pas être sortis de leur contexte.
Ils appartiennent à l’histoire et aux livres. Pour la vraie vie, il y a tellement d’autres valeurs qui me tiennent vraiment à cœur… (Ne jamais jurer de rien, par exemple)

Quand j’ai su que mon premier disciple était convaincu de ce que j’avançais, je fus pris d’un tremblement aussi intense qu’on me pensait atteint de paludisme… (Cette maladie que les racistes attribuent aux « africains noirs » et qui a fini par me toucher autant que j’ai touché le passant de tout à l’heure)

En fait, j’étais effrayé. Si ce fou arrivait à déclarer ouvertement sa rébellion, t’imagines bien qu’on va l’écrouer parce que si Dieu a créé le monde, c’est dans notre coin paradisiaque qu’on a inventé le Moulinex… Vous savez cet outil indispensable pour gagner sa vie en brisant celle des autres…

Sous le coup de la torture conventionnelle ou d'un interrogatoire musclé, il allait certainement me citer personnellement…
La nuit porte conseil… Je remercie Dieu d’ailleurs de m’avoir guidé vers la solution idéale.
Je me suis vite dirigé vers un des locaux de la brigade anti-jureurs-de-rien. On ne pouvait pas les rater, ils ont des locaux dans pratiquement toutes les bâtisses.
D’où le célèbre proverbe : « Entre deux locaux de la brigade anti-jureurs-de-rien, il y a bel et bien un autre local de la brigade anti-jureurs-de-rien »

Quand on m’a accueilli, j’ai éclaté en sanglots… On comprenait rapidement que mon émoi cachait de valeureux aveux…

« Je suis venu vous faire part d’un certain X.Y qui a affiché des signes de rébellion quant à notre bien-aimée charte : On ne peut jurer de rien.
J’en suis certain. Il avait même l’intention de diffuser ses idées périlleuses et étrangère à notre si belle culture dans la population.
J’ai essayé de l’en dissuader sans succès… »

En dénonçant cet innocent, je fus pris d’une joie intense… Je jubilais… Je ne parlais pas, mais je rugissais… Je me sentais fort, utile (pour une fois)… On m’écoutait attentivement
J’étais important…

L'homme en question fut aussitôt attrapé, écroué, condamné, torturé, castré, puni, dénigré dans les médias et il finit par mourir dans conditions mystérieuses. (Le dossier fut vite classé, ne me demandez pas pourquoi...)

Depuis, j’ai décidé d’intégrer la firme multinationale Moulinex, moi aussi.
Les meuniers de toute part ne sont pas meilleurs que moi. J’ai le potentiel pour être excellent dans ce domaine.

Désormais, je fais ce que j’aime le plus. Je prêche la révolte et dénonce ceux que j’arrive à convaincre !
J’ai même une prime supplémentaire pour chaque personne de plus que j’arrive à surprendre dans mes filets.
Mon métier ressemble beaucoup à celui d'un démarcheur, ou d'un chef de rayon dans un hypermarché sauf que, quant à moi, je peux très bien cumuler ouvertement deux boulots sans avoir à m'en faire.

Si vous me croisez un de ces quatres dans une des artères principales de votre commune, ne soyez pas nerveux ! Venez me parler, laissez vous faire… Sachez surtout, que vous n’avez absolument rien à craindre !

jeudi 18 février 2010

Habla (de l'arabe) y escuchamos




Elle est née artiste. Mort-née. Bornée. Chatouillant l’inspiration de tous ces chiens errants en mal d’être ce qu’ils sont et étant malgré tout, juste ce qu’ils essaient de brimer.

Marchant dans la brume épaisse des jours nouveaux. Tuant le temps à maintes reprises. Ce temps éternel s’estompe avant de renaître de ses cendres à nouveau.

Le temps ne renonce jamais. Mais elle a de ces abnégations, à faire douter un dinosaure de son existence.
D’ailleurs, ont-t-ils jamais existé ? N’eussent été ces foutus fossiles qui attestent de la véracité de leur passage…

En ce qui me concerne, je ne sais que son regard. Je ne comprends que son langage à peine balbutié dans la pénombre d’un 40° au soleil d’un 24 décembre ou d’un  35 du mois... Peu importe, après tout.
Je ne vis que de ses souffles ou de son spectre ou de sa vision trouble. Que sais-je encore ? Que dis-je ?

C’est l’effet enivrant d’un déodorant pour chiens aspergé en pleine face par accident ou par mégarde ou … Que puis-je avancer encore ?

Je cligne des yeux comme pour m’assurer de mon existence. Peut-être suis-je un dinosaure, on n’a pas retrouvé des fossiles de mon corps que je sache…
Cela m’inquiète outre mesure.

Mais rien que le fait de pouvoir cligner ses paupières tombantes par le poids des jours et des nuits éveillées, me rassure et apaise mon angoisse devenue insoutenable depuis que j’ai fini par savoir que X+Y égalent inéluctablement à Z.

Comment deux lettres ont eu le culot d’en égaler une autre…
C’est tout à fait hallucinant…

Dans mon délire je suture cette bouche qui me sert de parloir ou de source inépuisable de propos diffamatoire ou blasphématoire… Je suis un absurde notoire.

Je regarde un verre à la fois à demi-rempli et à l’autre moitié bien vide. Je ne sais plus quoi penser de cet ustensile qui représente le sort tragicomique qui m’est tombé dessus comme on lance un minable réfrigérateur dont le moteur a calé et dont la candidature pour réparation a été vite recalée.

Cette femme a accouché dans un taxi. Oui ! Je vous le jure !
C’est le taxiste qui a coupé le cordon avec une lame gilette qui trainait dans sa boite à gants pour je ne sais quel usage malencontreux. (Que vient faire malencontreux dans tout cela ?!)
Le bébé va bien. La mère est en bonne santé. Incroyable bonté divine !!
Des femmes accouchent en milieu médicalisé et risquent parfois très gros. Cette parturiente a un verre très rempli. Mais surement qu’il est quelque peu vide comme en témoigne la série de la voiture : 49. Elle ne devrait plus être en circulation.

La partie remplie a fini par inonder le vide qui le guettait de toute part… C’est l’effet tant escompté par les mesures d’arrosage par le judicieux système du goutte-à-goutte.

Des idées arrachées, détachées et recousues grâce à une poussiéreuse machine à coudre de marque Singer.
Un ensemble disharmonieux certes. Mais qu’importe ! Tant qu’on a l’ivresse, qu’on arrive enfin à tuer la tendresse et à déchainer un tant soit peu la liesse !

Ou peut-être pas… Que sais-je ?!

mardi 11 août 2009

Le temps est mort cet après-midi



Dans un moment d’inattention, et alors que je m’y attendais le moins, le verre de ma montre à la valeur sentimentale inestimable s’est brisé.

Je restais debout, sur place, abasourdi… Ne sachant plus si c’est un mauvais rêve ou une extrêmement dure réalité.
Je ne pensais jamais avoir à m’en séparer. C’était sans compter sur l’incroyable capacité du destin à dépasser la fiction, probablement pour donner aux écrivains réalistes matière à rédiger.

Sonné. Je m’étais accroupi pour ramasser les vestiges d’une montre grandiose qui m’indiquait le chemin comme le phare d’Alexandrie.
Mais tel est le sort des merveilles de ce monde… La perte inéluctable de leur éclat.
Comme le verre de ma montre qui a éclaté.
Ou mon âme dans sa profondeur qui a éclaté en sanglots alors que j’apparaissais impassiblement inerte.

Depuis que ma montre qui n’a pas de prix, s’est brisée, le temps s’est arrêté.
Il n’y a plus de soleil, plus de lune.
On n’est peut-être en plein jour, même s’il fait nuit.
Les expressions que j’emploie se sont soudainement habillées de structures pompeuses et anachroniques.
La vie elle-même a perdu tout son goût.
Il me faudra plus d’eau gazéifiée pour pouvoir digérer…
Et encore le résultat n’est pas acquis d’avance…

Mais il ne faut pas perdre de vue que c’est peut-être aussi un curieux signe du destin.
Le destin n’ayant pas les moyens de s’exprimer par un flux verbal et recourant inévitablement au triste langage des signes qui fait confiance à notre interprétation pour sa compréhension.

Parfois le message ne passe pas. Probablement dû à sa confiance déplacée en notre interprétation défaillante.
Mais j’aimerai plutôt le voir comme un « passes à autre chose ».
« Le destin est à tes côtés ».
« Tourne la page ! Tu ne crains plus rien ! ».
Même si j’ai l’intime conviction que le destin aurait très bien pu ne rien vouloir dire avec ce geste d’une infinie cruauté, ce n’est pas impossible, non plus, que ce ne soit qu’une manière comme une autre d’être méchant en ces temps de quiétude démesurée.

mardi 21 juillet 2009

A combattre la lune, on finit toujours par triompher



Il était trois heures du matin, je me réveillais en sursaut d’un cauchemar qui avait trop duré.
Trop de sang, trop d’obscurité, trop de ténèbres brouillant l’horizon.

Mon corps était crispé, paralysé par la peur de l’inconnu habillé de cette noirceur morbide qui fait que la nuit, nuit gravement à ma santé.

Je sortis ma panoplie de cow-boy vieille de treize ans comprenant avec exactitude une ceinture, un sabre qui avait tout l’air d’une arme à double tranchant, puisqu’elle avait le tort d’être à la fois très lourde à porter mais de n’être aucunement tranchante, un révolver en plastique et un fouet que j’avais perdu de vue depuis que j’ai eu la mauvaise idée de le prêter à notre jeune voisin. (vas savoir à quelles pratiques il est en train de servir actuellement)
Ainsi, je me rendis sur le champ de bataille sans trop tarder. Je m’étais fixé rendez-vous avec la lune, mais elle n’eut même pas le courage de venir en entier.

Elle m’envoya un minable croissant lumineux, comme si elle sous-estimait la puissance de mes coups.

Comme il était de coutume de le faire, j’ai commencé par lancer un « dieu est grand ! » pour que la lune sache à quoi s’en tenir.
Je me suis battu et débattu pendant des heures entières. Je transpirais et usais de toutes les techniques que j’avais apprises dans la rue.
Mais à mesure que le temps passait, mes forces s’affaiblissaient et je commençais à douter de ma capacité à rentrer victorieux de cette éprouvante et interminable bataille.

C’était sans compter sur l’on-ne-peut-plus précieux soutien de dieu le tout puissant !
Puisqu’à 5h16 très exactement, la lune a fini par abdiquer !
J’ai fini par gagner !
La lumière du jour prit définitivement place.
Personne ne le sut à part moi, mais j’étais à l’origine de toute cette modification de la morphologie du monde. J’ai réussi à chasser la noirceur de tout l’univers.
Désormais, la population mondiale tient son héro !
Je serai toujours là pour déloger les mauvais esprits qui viendraient en toute inconscience s’aventurer sur ma planète !

Je passais la plus belle journée de ma vie.

Mais, je n’eus même pas le temps de savourer…. Vu qu’à 19h37, si mes souvenirs sont bons. La planète commençait à récidiver.
La lune comprit qu’elle avait affaire à un adversaire coriace et m’envoya cette fois-ci un croissant encore plus volumineux que la veille.
Fatigué, usé, éprouvé et ne sachant plus à quel saint me vouer… J’ai fini par avoir la lumineuse idée que pour vaincre irréparablement la nuit, la seule et unique alternative qu’il y avait était de fermer les yeux dés que la lumière du jour commençait à disparaître pour empêcher que l’obscurité ne hante notre âme ne l’abandonnant qu’après l’avoir dénué de toute inspiration, ingéniosité et de toute son essence.
J’ai été qualifié de fou allié, voire de fou à lier… Certains sont même allés jusqu’à me juger bon pour la guillotine.

Mais je sais que quelque part dans ce bas monde existent des aventuriers de ma trempe, je passerais le restant de mes jours à les rechercher. Mais un jour, je le sais, on s’unira pour faire abdiquer la nuit à jamais !

lundi 13 juillet 2009

Le mariage littéraire comme solution à la crise financio-existentielle

Je pensais être trop jeune pour penser au mariage ou plus tourné vers la gent féminine. J’ai fini par faire la singulière découverte de mon irrésistible attirance pour les mots.

Pas un «justice immanente » ou un « populisme » que je n’aie pas fini par désirer. Pas une belle tournure de phrase qui ne m’ait pas fait tourner la tête.

Quand j’ai commencé à courtiser les expressions, je n’aurais jamais pu imaginer que je finirais un jour par en être attaché au point de prendre un terme pour épouse. C’était sans compter sur le tyrannique décolleté qui mettait en valeur la générosité de la nature avec ce mot qui avait pourtant si peu de lettres.

J’ai fini, donc par succomber au charme des mots. J’ai accédé à leur monde qui ne demandait ni visa ni entretien ni même une présélection. C’est dire combien les jeunes d’aujourd’hui se désintéressent de cette dimension, pourtant si captivante.

Le jour de notre mariage, on a choisi un orchestre muet.
C’était une grande première mondiale. Jamais une union n’avait été célébrée en silence que je sache.

Mais certains mots étaient bien trop sensibles pour se taper quatre heures de pollution sonore, de Fatma Bousseha dont la valeur des chants se mesurait en décibels.
Cela risquait d’heurter cette sensibilité à fleur de peau et de réveiller ainsi certains maux.

Parmi les convives, il y avait toute la « high society » des phrases. Il y avait toute l’académie française… Des « néanmoins » en pagaille, aux verbes conjugués à l’imparfait du subjonctif en passant par des mots pompeux ou interminables tels « anticonstitutionnellement » qui passait la soirée à se vanter d’être le plus long de l’assistance.

On s’est acharné à organiser pacifiquement ce mariage et pour ce, on était obligé de veiller à ce que l’indicatif ne s’attable jamais à un subjonctif. Vu que ce dernier trop imbu de sa personne ne pouvait concevoir d’être attablé à un minable verbe au présent de l’indicatif. Encore moins s’il était aussi du premier groupe.

J’étais entouré de phrases simples et concises qui circoncisaient l’abjection d’une routine et d’une lassitude qui se faisaient insupportables et paraphrasaient un bien-être que je croyais perdu pour toujours. La vie était si belle dans cette peuplade éloignée.

J’étais comblé de bonheur. Je n’avais jamais soupçonné l’existence de tels plaisirs en dépit de leur présence à ma portée depuis mon jeune âge.
J’ai perdu tant de temps à rêver ou à aduler telle ou telle créature terrestre, lamentable mortelle.
Alors que j’avais tout près de moi toute l’immortalité.

Dieu m’a guidé vers le droit chemin même si, dans ma vie, j’ai pris le deuxième tournant à gauche.

Par accident, j’étais revenu. Ou peut-être ne suis jamais retourné.
Ou peut-être n’est-ce qu’un mirage…

Vivre dans un monde artificiel, un faux-idéal, une république montée de toute pièce, lever les yeux au ciel et prier pour je ne sais quelle faveur et voir l’utopie dans l’immense obscénité de ces faubourgs oubliés.
C’est peut-être là, le chemin le plus puéril du bonheur, mais probablement aussi le plus fantastique et le plus surprenant.

samedi 30 mai 2009

Le formidable itinéraire d’une crotte de nez

15h37. Temps outrageusement ensoleillé. Les deux personnages de ce récit sont Lamine, un tunisien lambda (et qui ne se connaît pas en tant que tel d’ailleurs)
Rien à foutre de toute la journée à tenir ce poteau, à caler un mur, à recaler son avenir encore et encore.
Lamine miné par les remords d’une vie qui a filé discrètement entre ses mains a comme passe-temps favori comme bon nombre de tunisiens de se fourrer le doigt dans le nez en public.
C’est sa manière à lui d’emmerder le système, de s’opposer, de dire non. Les regards indignés des passants qui le dévisagent suffisent à lui insuffler une joie de vivre immense en dépit des aléas de sa piètre existence.

Ainsi, c’est tout un rituel qui se réitère à chaque fois. Avec les mêmes ongles mal coupés qui se démènent pour gratter cette même muqueuse nasale noircie par la pollution qu’il inspire à longueur de journée.
Par la suite, le génie de l’être humain fait que retourner la morve endurcie par la chaleur de l’air pour former des projectiles, soit un acte d’un naturel fabuleux.
Comme ses compatriotes Lamine était passé maître en la matière et il ne se lassait jamais de refaire indéfiniment les mêmes gestes d’autant plus que le plus palpitant dans l’expérience restait à venir.
En effet, ce projectile à la fois doux et ingénieux pouvait être lancé dans toutes les directions. Lamine ne manquait pas d’imagination. Et il trouvait toujours une nouvelle cible qui allait devoir supporter le poids d’une crotte de nez tant encombrante que légère.

16h39. Toujours la même position, avec trois victimes de plus dans le carnet de route de notre « Hitiste » héro d’un soir.
La Chéchia délavée de « Amm Hmed », le pare-brise d’une Opel Corsa ancien modèle et enfin le pelage d’un chat couleur grise (presque métallisée).

Lamine répondait à tous ceux qui lui reprochaient son excès d’animosité, qu’il fallait savoir ainsi profiter des petits plaisirs de la vie, que dieu nous avait gratifié d’un seul nez et qu’on se devait d’en prendre soin en échange de sa fonction…
Drôle de logique mais qui ne se défend pas moins.

mercredi 1 avril 2009

Seul face à sa feuille blanche

Envie de rien.
La mort dans l’âme.
L’esprit embrouillé.
L’avenir embrumé.

Seul face à sa feuille blanche.

Nul ne sait l’écouter, le comprendre.
Nul ne voit en lui ce qu’il est vraiment.

Seule cette feuille format A4 assaisonnée avec un porte-mine 0.7 qui la creuse et ne s’en excuse même pas, sont là quoiqu’il se passe.
Qu’il neige ou qu’il pleuve averse, elle ne se lasse jamais de lui tenir la main.
Elle était son hobby mais elle est vite passée au rang de passion puis même de véritable raison de vivre.
Personne ne réussit à percer véritablement tous les mystères de cette ascension fulgurante qui a littéralement transformé le destin d’une minable feuille blanche qui aurait bien pu finir aux oubliettes.

Elle noircit à coups de phrases inachevées mais se lave souvent la conscience à coups de bains d’encre sans trop s’en faire. Quand il écrivait, il la blessait, elle se taisait mais versait indéfiniment du sang d’encre.

Il était fort avec les mots, elle était à peine remise de ses maux, qu’il se remettait encore à la noircir, à lui ternir l’esprit.

Il était le seul, elle était l’unique. Ils affichaient tout deux le même visage, la même mimique.
Ils ne faisaient plus qu’un…

Esseulé face à sa feuille blanche, sa solitude s’est envolé, il a atteint le Nirvana, le sommet du Boukornine.
Qu’a-t-il vraiment fait de sa vie, celui qui n’a jamais frémi d’émotion en atteignant la pointe du Boukornine ?!