Les fidèles du Boukornine

samedi 30 mai 2009

Le formidable itinéraire d’une crotte de nez

15h37. Temps outrageusement ensoleillé. Les deux personnages de ce récit sont Lamine, un tunisien lambda (et qui ne se connaît pas en tant que tel d’ailleurs)
Rien à foutre de toute la journée à tenir ce poteau, à caler un mur, à recaler son avenir encore et encore.
Lamine miné par les remords d’une vie qui a filé discrètement entre ses mains a comme passe-temps favori comme bon nombre de tunisiens de se fourrer le doigt dans le nez en public.
C’est sa manière à lui d’emmerder le système, de s’opposer, de dire non. Les regards indignés des passants qui le dévisagent suffisent à lui insuffler une joie de vivre immense en dépit des aléas de sa piètre existence.

Ainsi, c’est tout un rituel qui se réitère à chaque fois. Avec les mêmes ongles mal coupés qui se démènent pour gratter cette même muqueuse nasale noircie par la pollution qu’il inspire à longueur de journée.
Par la suite, le génie de l’être humain fait que retourner la morve endurcie par la chaleur de l’air pour former des projectiles, soit un acte d’un naturel fabuleux.
Comme ses compatriotes Lamine était passé maître en la matière et il ne se lassait jamais de refaire indéfiniment les mêmes gestes d’autant plus que le plus palpitant dans l’expérience restait à venir.
En effet, ce projectile à la fois doux et ingénieux pouvait être lancé dans toutes les directions. Lamine ne manquait pas d’imagination. Et il trouvait toujours une nouvelle cible qui allait devoir supporter le poids d’une crotte de nez tant encombrante que légère.

16h39. Toujours la même position, avec trois victimes de plus dans le carnet de route de notre « Hitiste » héro d’un soir.
La Chéchia délavée de « Amm Hmed », le pare-brise d’une Opel Corsa ancien modèle et enfin le pelage d’un chat couleur grise (presque métallisée).

Lamine répondait à tous ceux qui lui reprochaient son excès d’animosité, qu’il fallait savoir ainsi profiter des petits plaisirs de la vie, que dieu nous avait gratifié d’un seul nez et qu’on se devait d’en prendre soin en échange de sa fonction…
Drôle de logique mais qui ne se défend pas moins.

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