Les fidèles du Boukornine

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mardi 28 juillet 2009

Si seulement il avait su…



19h32, Rue de Rome, Tunis

Personne ne le sait, mais dans exactement deux minutes quarante-sept secondes un jeune fougueux aux cheveux longs gominés va trouver la mort subitement à la suite d’un terrible accident de la voie publique.

Les circonstances de l’accident sont d’autant plus dramatiques. Ayant eu le tort de traverser trop occupé à défendre l’honneur de son club favori, une ISUZU n’a même pas daigné lui causer une mort digne…
Vu qu’elle l’avait écrasé tel un minable cafard avant de prendre la fuite sans que personne n’ait la présence d’esprit de noter sa plaque minéralogique.

Comme à son habitude la populasse s’est ruée sur « l’évènement » pour admirer le formidable paysage d’un jeune agonisant entouré par une effroyable mare de sang.

La totalité des témoins étaient restés les bras croisés, les yeux braqués vers la victime du jour de cette hécatombe que sont nos routes.
Aucun n’a pensé à alerter les secours omettant peut-être qu’il est un devoir citoyen élémentaire que de porter secours à une personne en danger ou du moins à appeler le SAMU.
Sous d’autres cieux on aurait réclamé et surement trouvé parmi les « spectateurs » une personne formée au secourisme comme il était de coutume de procéder.
Mais chez nous, on vous répondra naturellement que « Ce n’est pas ma spécialité !»

L’esprit du jeune homme étendu sur le sol, travaillait à une vitesse effrénée. Il se répétait inlassablement : « Non ce ne peut pas être la fin… »

Mais, si…bien hélas.
On ne choisit pas sa mort. S’il avait eu le choix, il aurait au moins préféré une voiture un peu plus luxueuse qu’une méprisable ISUZU.

Il regretta amèrement de n’avoir jamais cassé la gueule à leur voisin de palier qui s’acharnait à lui pourrir la vie sans qu’il ne réponde sous prétexte de respecter les règles rudimentaires de la bienséance.

Ou cette brune au teint clair qu’il contemplait chaque jour en croisant de temps à autres son regard hypnotisant. Mais, il ne lui avait jamais parlé de son amour de peur, certainement de se voir chassé définitivement de son royaume, ce qui pouvait anéantir sa vie d’un coup.

La prière aussi… Oui la prière !
Pourtant, il n’y avait jamais songé. Quand il entendait l’appel à la prière résonner dans l’atmosphère, c’était pour lui rien qu’un son dénué de toute portée.
Mais maintenant avec la face contre terre, mordant la poussière, à deux pas de la fin, il y pensait fortement.
Pourquoi il a fallu qu’il soit dans cette situation peu enviable pour juger bon de se prosterner ?
L’homme a cette incroyable capacité de n’atteindre l’humilité que lorsqu’il a tout perdu.

Sa vie défilait devant ses yeux, par bribes d’images avec comme image de fond le spectre de ces hyènes qui faisaient mine de s’apitoyer mais qui dans le fond, il le savait pertinemment n’étaient là que pour assouvir leur soif de sang.

Pour une fois, il était la star, celui qui retient l’attention de tous. En soit, c’est une incroyable ascension sociale pour l’extrêmement timide qu’il a toujours su rester.

C’est le moment où il commençait à balbutier quelques syllabes pour retenir l’attention de la foule endormie sur la nécessité de prévenir rapidement les secours, que la mort a choisi.
Et la mort, c’est bien connu, a toujours le choix. Elle aurait même pu lui distinguer une voiture de luxe pour le sale boulot… Mais, voilà !
La mort s’est prononcée et il a fallu que ce soit une ISUZU qui s’exécute.

Dix minutes plus tard, l’équipe du SAMU arriva sur les lieux et s’acharna vainement à réanimer un patient déjà parti sans retour.
Les gens continuaient à affluer de toute part pour ne rien rater de ce spectacle tant surprenant que gratuit !

Mais ces adeptes de séries tv en mal d’adrénaline et passant la majeure partie de leur temps à cultiver leur hébètement derrière un écran d’ordinateur n’affichant qu’une seule adresse, celle de facebook, peinaient à croire que c’était fini.

Oui ce jeune bien portant est décédé sur les lieux de l’accident.
Heure du décès : 20h approximativement.

La foule, ayant fini par comprendre, avait commencé à se dissiper laissant sur place ce corps inanimé gisant momentanément en l’attente d’être déplacé.

Ils se frottaient pratiquement tous les mains, ce soir ils auront au moins une histoire extraordinaire à raconter sous les yeux ébahis de leurs proches.
Ils se surpasseront chacun à sa manière à enrober l’histoire d’un caractère surréaliste pour décupler l’effet sur les auditeurs.
Dommage que vu la nature macabre de ces faits, personne ne les applaudira vers la fin.

samedi 23 août 2008

Le château de sable



Si ce petit bonhomme se prend les rayons du soleil en pleine face sans grogner c’est qu’il est trop occupé à façonner son château. Il le veut beau, grandiose et luxueux à savoir à l’antipode même de leur maison…
Sa mère le regarde avec intérêt et se surprend à rêver de le voir un jour architecte et puis elle fait un bond en arrière juste à l’idée que rien ne l’empêchait de devenir maçon comme son père.
Pour lui, le monde n’existe plus.
Il se sent coupé de tout son environnement.
Il les regarde mais ne les voit pas.
Il n’arrive qu’à voir quelques bribes de son rêve… Encore faut-il qu’il meuble l’espace entre cette multitude de morceaux qui ne cherchent qu’à être complétés.
Ce dont il est sûr pour l’instant, c’est qu’il veut avoir dans son palais une dizaine de toilettes toutes bien équipées… Car il n’a vraiment plus envie d’attendre, comme chaque matin, que tout le monde ait fini pour aller soulager sa vessie. La priorité étant donnée, chez eux en fonction de l’âge. Il se dit que c’était injuste et que ce n’était surement pas de sa faute si son âge ne correspondait pas à ses aspirations.
Concernant le salon, la salle à manger, le coin barbecue et tout le reste, il attendra de peur de se fixer un idéal qui risque de se démoder dans les semaines (sinon les jours) qui suivent.
Mais sa mère le verrait mieux en avocat et a peur qu’à force de se bourrer le crâne par ses bâtisses, il en devienne rien que par erreur un minable maçon comme son père, incapable même d’acheter à ses enfants les habits de l’aïd.
Et sa mère s’abandonne à ses rêves et appuie sa tête contre ce ballon qu’elle avait ramené pensant vainement qu’elle allait en occuper son fils.
Elle s’endormit.
Elle fut réveillée par des cris provenant de l’eau. Elle se dit alors indignée de cette foule qui ne sait pas respecter la quiétude des gens.
Mais non ?!
Mais si !
Qu’est-ce qu’elle voit là ?
C’est son fils que le maître-nageur tient entre ses bras !
Non ! C’est impossible ! Il était juste là avant qu’elle ne s’endorme !
Satanée sieste !
Elle s’en trouva paralysée dans son coin… Elle ne sut quoi faire… Elle regardait le présumé sauveur de son fils qui venait lui annoncer d’un ton grave… qu’il n’était malheureusement pas parvenu à (justement) sauver sa progéniture.
Elle n’en crut rien !
Elle répéta des dizaines de fois la question : « Mon enfant unique est mort ? »
Les yeux rivés vers le sable de tout ce monde qui l’entourait voulaient dire « Oui madame… » Avec une compassion qu’elle ne sut apprécier à sa juste valeur… Trop occupée qu’elle était à penser au lieu d’enterrement, à la manière d’annoncer la nouvelle à son mari et à tout ce que l’esprit pouvait évoquer à l’écoute d’une telle dépêche !
Elle revenait vers l’endroit où elle avait planté le parasol. Elle regardait le château de sable qui était la dernière œuvre qu’aura laissé le seul espoir de sa vie.
Le palais beau, grandiose et luxueux n’était plus.
Une vague était venue ébranler tous les efforts ultimes de son enfant et n’a pas omis, par la même occasion d’emporter ses rêves innocents.
Son esprit sadique vint enfin lui rappeler qu’elle n’aurait au moins plus à y penser… Son fils ne sera jamais maçon comme son père...

vendredi 11 juillet 2008

L'hécatombe des routes tunisiennes


L'alcool tue lentement.
Si vous êtes pressés d'en finir, il y aura toujours la moraura.
Pour une mort moins douloureuse et qui vous expédie le plus rapidement un jeune au cimetière le plus proche, je vous conseille la route tout simplement.
C'est le moyen le plus en vogue actuellement. Des millions ont déjà succombé aux charmes de ce moyen peu commun.
En rentrant d'une soirée quelque peu arrosée, ou en parfait état de sobriété nous sommes prêt à vous venir en aide et à vous arranger ce départ prématuré vers l'éternel.
Si vous choisissez de mourir pendant l'été, si votre âge est compris entre 18 et 22 ans et avec un peu de chance, vous pouvez profiter de notre incroyable promotion saisonnière avec le "new pack all included" où l'on se charge même des frais des pompes funèbres.
Et si vous avez l'obligeance de nous rajouter une toute petite prime, vous aurez même l'honneur de passer dans le JT de 20 heures de TV7 dans le cadre de la virulente campagne de lutte (perdue d'avance) contre les accidents de la voie publique.
Imaginez! Toute votre famille si fière de vous qui se rassemble pour admirer votre exploit routier!
Je devine que vous en frémissez déjà!
Joyeux été!

Triste ton ironique pour mettre en garde notre jeunesse d'une mort qu'on ne voit jamais venir, mais qui vient (quand-même) trop souvent.