L’externe Ahmed se lève avec son air abattu après ce sommeil nullement réparateur.
Il prend le bus puis le métro pour rejoindre à la fin de son périple le service qui est censé le former à être un bon médecin.
Dés son entrée, il est accueilli avec les cris de la secrétaire qui lui rappelle encore une fois que le chef de service lui a ordonné de ne plus accepter aucun externe neuf heures du matin passée.
L’externe accepte volontiers cet accueil chaleureux et fait mine de n’avoir rien entendu devant les yeux larmoyants de cette étudiante qui l’accompagne et qu’il s’est évertué à émerveiller tout le long de son trajet.
Les deux victimes continuent leur bonhomme de chemin, tout droit vers la salle de staff où se trouve réunie toute l’équipe des médecins du service en attendant l’arrivée du messie alias le chef de service, qui comme tout être important digne de ce nom ne raterait pour rien au monde cette occasion rêvée de se faire désirer.
Le staff ayant enfin commencé, les yeux se sont mis à énumérer le nombre de chaises dans la salle, les mains à moitir et les esprits à vagabonder cherchant désespérément à meubler ce temps paradoxalement libre.
On discuta, le sourire aux lèvres de cas qu’on qualifiait généreusement de «foutus », « irréparables », « presque morts »… Et on ponctua les observations par des phrases à l’humour venu d’une autre époque.
Les autres externes s’évertuaient pourtant à rire aussi bruyamment que possible pour laisser entendre aux séniors, qu’eux au moins, ils avaient compris.
Soudain, le chef se tourna vers Ahmed et le pointa avec son index en criant « Toi ! L’externe ! »
En l’entendant, il commençait à suer, son cœur battait à une fréquence surhumaine sa paupière supérieure gauche semblait ne plus vouloir s’arrêter de cligner.
La star du service lui posa une question qui lui paru la plus longue de toute l’histoire des questions. Quand c’était à son tour de répondre, il se demandait même avec quelle tournure le supérieur de tous ses supérieurs avait préludé son interrogation.
Le chef des lieux n’ayant pas trouvé de réponse se mit gentiment à faire étalage de son immense savoir en matière d’évocation de la mère, de la tante et de toute la joyeuse famille de cet externe même pas capable de suivre une question jusqu’à la fin.
L’externe leva la tête pensant que cette hiérarchie virait trop souvent à l’anarchie et en voyant la tête que faisait cette fille qu’il essayait par tous les moyens de courtiser. Il n’y avait plus rien à faire. Il se devait de rétorquer pour aspirer un jour à sortir avec elle.
Il fixa de son regard glacial le chef des chefs, le maestro, le seul et unique à pouvoir insulter impunément tous ces clowns présents dans la salle de staff et il dit en criant : « Par les pouvoirs qui vous sont conférés, vous pouvez me refuser la validité de ce stage, vous pouvez me crier dessus, vous pouvez me mépriser autant que vous voudrez et je ne conteste aucunement ce statut privilégié sauf que la mère qui m’a porté neuf mois et qui a failli y passer en me mettant au monde m’a toujours demandé de garder la tête haute même dans les pires situations… La dignité n’a pas de prix mais elle a va certainement me coûter un stage non validé…Quelle perte ! Je me disais aussi que ce serait agréable de venir passer l’été dans ce service constamment climatisé ! D’ici là cherchez vous une autre tête de turc… Au plaisir »
Et il quitta la salle en arborant cette carrure impressionnante. Tous les êtres ici présents auraient salués cette réaction légendaire par des applaudissements (étant la seule activité à laquelle ils étaient vraiment doués) si ce n’était la violence avec laquelle le chef avait réagi.
L’externe érigé soudain en héro national retrouva la fille de son cœur qui fut sous le charme de ce brave chevalier au charisme incroyable qui a défendu l’honneur de sa famille jusqu’à son dernier souffle…
Il lui a confia dans une quiétude qu’on ne ressent que durant les moments qui suivent les grandes victoires : « J’espère qu’Hippocrate me pardonnera d’avoir manqué de respect à un maître… Mais je suis sûr que s’il écoutait toute l’histoire il comprendrait ! »
7 commentaires:
Et ils se marièrent ou peut-être pas et donnèrent, ensemble ou peut-être pas, naissance à toute une magnifique descendance d'Ahmed qui soulevèrent le monde, un nouveau monde...
magnifique post com dab koi Khalil!!
mais imaginons pendant un bref instant ce que ça donnerait si l'externe en question serait une certaine "Mariem" au lieu d'un certain "Ahmed"
(ça n'a rien de personnel si g choisi le prénom de Mariém, c'est juste le prénom le plus utilisé en tunisie)
très belle histoire khalil...!!!
mis ne serait-elle pas un tout petit peu autobiographique? :-)))
avec ton air un peu révolté, ça ne m'étonnerais pas de toi...
Ces chefs de service à l'ego hypertrophié , doivent avoir une compétence defiant toute concurence ,et ce n'est que pour cela que les etudiants tolérent et laissent passer leur humeur qui n'est pas du gout de tout le monde .
Mais de là à proférer des mots incorrects à son encontre (étudiant envers son prof)je trouve que ce n'est convenable ; le respect de la hierarchie , c'est ça qui confére une personnalité à l'etudiant .
Toute personne sur un piedestal (un vrai) a tendance à abuser de son pouvoir . Beaucoup oublient ce qu'est l'humilité .
Trés bon post par ailleurs .
Bonne rentrée;)
et oui, ça recommence!!!
--> Mad djerba
Ne me dis pas que tu connais l'histoire ? :)
C'est la suite exacte ! :))
--> Najet
Mariouma ?
Tfahemna el marra ejaya méla :)
--> Weldbyrsa
Khouya byrsa :)
Ma nkhabbich 3lik... Il y a du vrai dans l'histoire :)
ma tchala9ch 3ad!
-->Polytech
Très bien dit !
Sauf que j'ai une autre vision concernant la hiérarchie... Que leurs coups de nerfs soient justifiés à la limite on peut accepter... Mais que les plus bas placés sur l'échelle de richter soient pris pour des souffre douleurs... Ma 9alech bih rabbi :)
-->Pink
:))
3amek mabrouk ya zamilty ! :)
bravo khalil!!
jai adoré ton poste comme jai adoré ton blog ;))
3idek mabrouk ;)
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