Les fidèles du Boukornine

jeudi 13 janvier 2011

Petit Papa Noël, je veux une dignité pour mon peuple !





Père Noël, pour ne rien te cacher, je ne crois pas en toi.
D'ailleurs, quand Coca passait un spot publicitaire où tu jouais, je croyais plus à la capacité de la boisson de Hamadi Bousbii à dessiner un sourire sur les lèvres d'un enfant que de celle d'un personnage créé de toute pièce par l'Eglise catholique de faire de rêves puériles irréalisables une réalité.

Mais, aujourd'hui, petit Papa Noël, je m'en excuse, du fond du coeur.
Mon peuple joue au paintball avec des hommes en noir avec des balles réelles.

Des estafettes de la garde nationale prennent feu spontanément ainsi que des wagons de trains de fret, n'en parlons même pas de l'autocombustion de vendeurs de clémentine à la sauvette, assimilables à de méchants citoyens qui prennent à partie de charmants agents de police municipale.

Des pistolets portés par des hommes en tenue, laissent éclater leur colère, répandent le mal et envoient des mâles et des femelles par terre.

Des jeunes qui ont marre du paintball se prennent au jeu de la roulette russe en escaladant des lignes de haute tension avant d'embrasser la mort et de l'étreindre, elle qui vient aux aguets dans son plus simple appareil, réveillée en pleine nuit par les sirènes des forces de l'ordre qui diminuent les chiffres du chômage à leur manière, en neutralisant des chômeurs.

Les officiels minimisent, ce qu'ils considèrent comme "une simple partie de paintball qu'il serait fort condamnable de sortir de son contexte"
Il faut avoir du fair-play ! Rappelons-nous du slogan de la FIFA: My game is fair play !
So?
So what ?

L'escalade de la violence dans mon pays m'attriste, m'atterre et me choque.
Je vis dans l'angoisse pour les familles qui seront brisées par des arrestations abusives, des condamnations surement à venir et des balles perdues qui atterriraient sur des tempes innocentes.
Je suis la langue d'un corps tunisien dont le coeur est de Sidi Bouzid, le foie de Menzel Bouzayene et le rein de Meknassi.

Petit Papa Noël, je ne sais plus à quel sain me vouer !
J'ai demandé au Dieu des musulmans, puis celui des chrétiens, celui des juifs n'a pas donné signe de vie non plus, Bouddha s'est tu, toutes les mythologies m'ont délaissé, le soleil, la lune, diverses statues à diverses effigies n'ont rien pu faire... J'en suis même arrivé à me prosterner pour le dieu des athées. Rien n'y fit.

Aujourd'hui c'est vers toi que je me tourne.
Je veux une dignité pour mon peuple !
Je veux une liberté d'expression !
Je veux une solution au chômage !
Je veux polémiquer librement sur les terrasses des cafés à propos de la gestion d'une crise par un gouvernement, la critiquer et pouvoir tout de même envisager le lendemain avec sérénité.
Je veux un accès libre à internet !
Je ne veux plus avoir des SuperMenteurs en guise de responsables !
Je veux voter en ayant l'impression de décider librement, dignement, décisivement et concrètement !
Je veux avoir une opinion politique sans être taxé "d'opposant" au premier désaccord, terme lancé à la figure comme une accusation de viol sur mineure.
Je veux qu'il n'y ait plus de détournement de fonds, plus d'abus, plus de népotisme, plus de fumiers qui se targuent d'accaparer le patriotisme tout en extorquant des fonds destinés à de pauvres gens malheureux.
Je veux plus qu'il y ait de politisation de performances sportives ni d'instrumentalisation de faits divers.
Je veux qu'on soit traité tel un peuple et non pas comme un troupeau.
Je veux que Wikileaks me dise que mon pays va mieux.
Parce qu'aujourd'hui le corps dont je fais partie est fébrile.

Je veux, aussi, que cette migraine qui me cloue la tête à l'oreiller et qui me fait redouter toute lumière cesse à jamais.

Père Noël, si tu ne me répondais pas, demain je réitérerais ma demande à l'arbre imposant qui signe de son ombre un terrain vague juste à coté.
Peu importe si on m'étiquetais comme fou. Un jour mon peuple triomphera et mon militantisme à la Don Quichotte aura raison des oppresseurs. D'ici là, dormons. Peut-être que nos ronflements diffuseraient nos bonnes intentions et soulageront nos migraines.

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