La patrie, c'est pas vous. Vous pourriez tous partir, on sera tout aussi chez nous.
La patrie, c'est pas les plages au sable fin ni les chameaux, ni le soleil assommant qui attire encore quelques touristes.
La patrie, c'est un drapeau rouge sang centré par une étoile et un croissant ! Véritable symbole de la nation, incontestable et indiscutable. Même si le profaner est devenu un sport national et complètement impuni.
La patrie, c'est une terre féconde qui a les cheveux aux quatre vents arborant un regard serein et un sourire insolent.
La patrie n'a rien à voir avec une quelconque idéologie, un parti ou un mort-vivant que vous vénèreriez.
La patrie ce sont les vestiges des civilisations passées, les sangliers et le cyclamen du Boukornine, le phosphate du sol du bassin minier, la plage de Kelibia, le domaine de Shadrapa, les misères juxtaposées de Douar Hicher, la délinquance engagée des quartiers populaires et la faim insatiable des chômeurs perpétuels.
La patrie, c'est l'Harissa, le lablebi bel hargma et le kafteji du hattab.
La patrie, c'est les glibettes noires de préférence, noires de ressentiments, noires de révolte, noires par essence, noires de naissance.
La patrie c'est les paysages pittoresques qui ornent le pays, les détritus oubliés un peu partout qui réduisent la propreté à une légende urbaine.
La patrie c'est quand tu rentres à 2h du matin, un mardi soir anodin où tout le monde dort, et là, petit, tu verras le pays s'illuminer, tu verras que c'est trop beau Tunis. Tu te sentiras chez toi, cette plénitude, ce bonheur, cette sécurité, cette envie impérieuse de t'assoupir dans les bras de ton pays, petit, tu ne ressentiras cela nulle part ailleurs.
La patrie, c'est quand tu chiales comme une tapette alors que tu as tout pour toi. Parce qu'ils ont volé ta révolution, parce qu'ils ont confisqué ton rêve, parce que tu as vu cet SDF à qui personne n'a accordé une prime de logement de 900 dinars, parce que la liberté n'est plus qu'une chimère et parce que le terrorisme d'Etat n'a jamais été aussi révolutionnaire.
La patrie, c'est quand ta mélancolie dégoûte tes lecteurs mais que tu n'en as rien à cirer. C'est quand tu déverses ta poésie à tous les coins de rue, que tu couvres la laideur du quotidien de jeux de mots pourris et autres calembours avant de t'essuyer la gueule avec ces bouts de torchons pseudo-journalistiques.
La patrie c'est une partie enfouie en chacun de nous, un cancer metastasé qui endolorit notre quotidien et fait de nous des cas désespérément perdus.
La patrie, c'est quand tu arrives au beau milieu de ta vie, que tu te retrouves seul, sans foi ni biens, sans amis ni ennemis, sans armes ni larmes, sans volonté ni révolte puis qu'en pleine errance, tu t'abandonnes à fixer l'asphalte, que tu souris et que tu y vois un repère après lequel il ne peut y avoir d'égarement.
La patrie, petit, se résume dans son regard.
La patrie, petit, c'est quand tu t'exiles dans ses bras, que tu t'abandonnes à son sourire et que tu t'oublies à la contempler.
Un jour peut-être, tu comprendras, que la patrie, c'est elle, petit.
La patrie, on l'aime ou on la quitte et même quand on la quitte, on l'emporte avec soi, sans le vouloir, sans le savoir mais on s'en rend compte une fois, un dimanche après-midi, ennuyeux, interminable et pluvieux. Au milieu des cheveux blonds, des regards émeraude, on se dit que rien ne vaut le chaos ambiant dans une ruelle du centre-ville entre matraques d'une police sauvage, aspirations dictatoriales de ces masses appauvries, incultes et approximativement pieuses et du fricassé dont le goût et le gras sont noyés dans celui de l'harissa.
Ausculte ton cœur petit, entends-tu ces battements à un rythme effréné, petit. Au final, c'est ce qui reste de la patrie quand tout s'en va, petit...
4 commentaires:
Sincèrement touchée. Merci d'avoir partagé ça
le domaine de Shadrapa :) ychaya7 ri9ek :)
L'Amour de la Patrie est grandiose!
Ne soyez pas pessimiste envers les compatriotes qui ne manifestent pas la révolte.
Le réveil des consciences révolutionnaires doit être imminent car les résultats de la constituante et du gouvernement sont lamentables:incompétence, malhonnêté,dictature...
C'est bien tout ça (et je te félicite pour cette passion); mais la patrie ce n'est pas ça...
la patrie ce ne sont pas les mots pour décrire ta fougue et passion pour un idéal, pour une révolution, pour une histoire, pour un sol ou pour le sentiment d'appartenance à un peuple.
la patrie ce ne sont pas les mots de cette jeunesse si vivante qui court dans tes veines.
Distingues bien entre la patrie de ton amour pour elle! la patrie n'est pas une affaire de sentiments. la patrie n'est pas l'affaire des circonstances...
Autant, je comprends ton attachement la terre qui t'a vu naître; auatnt tu dois comprendre mais la patrie dépasse ton attachement à elle.
Prends de la distance. prends du recul avec toi-même et avec ces sentiments envers ta patrie qui font tant battre ton coeur...
Ne me comprends pas mal. mon commentaire est peut-être plus intentionné qu'il n'en a l'air
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