Le crépuscule annonçant la fin d’une journée ressemblant étrangement à la veille, submergé par la lassitude et appréhendant que le lendemain ne déroge pas à la règle, lui non plus, je décidai de partir prendre un souffle nouveau du Boukornine.
Arrivé au pied de ma merveilleuse montagne, j’entamai ma grimpée dans une piété digne de l’adorateur de ces deux cornes que je suis.
Pas à pas, balançant les bras machinalement pour amadouer les lois de la gravité.
Des cyclamens me croisèrent au chemin de ma destinée. Ils me saluèrent avec une courtoisie exemplaire comme s’ils affichaient fièrement leur soutien à ma quête légitime de vie à travers les méandres de ma virée nocturne.
Les sangliers, eux-mêmes, sont venus pointer leurs nez, étonnés qu’ils fussent de voir que les gens de mon espèce n’étaient pas déjà éradiqués.
Fallait les comprendre, d’un autre côté…
J’imagine bien votre réaction si vous croisiez un tyrannosaure sur le bas-côté de la route obscure menant à Naâsen ou à Takelsa.
Le vent aussi, était du voyage. Il n’hésita pas une seule seconde à souffler à me caresser les ambitions dans le sens du poil… Ou dans le sens des aiguilles d’une montre.
Cela dépendait surtout de l’angle d’où l’on voyait les choses.
A peine arrivé au sommet de cette montagne digne des plus fantastiques des contes de fées, un sentiment de bien-être m’avait envahi.
Mon regard surplombait toute cette banlieue et j’osais même croire que c’était toute la planète que j’avais l’honneur d’admirer.
Cet horizon lointain ne pouvait être que la fin du monde.
En ce moment bien précis j’ai beaucoup de peine à concevoir que la terre est ronde.
La preuve en-est, Rien ne tourne vraiment rond ici bas.
Force était donc de constater que cette vue était absolument imprenable, je prenais tout de même mon temps à l’apprécier.
L’heure était à la méditation.
A mon âge on commence à se poser des questions sur des notions qu’on pensait acquises et consolidées depuis fort longtemps.
Je ne suis pas aussi sûr qu’avant que un et un font inéluctablement deux.
Je ne suis plus certain que l’argent ne fait pas le bonheur ni même convaincu de la limite entre le bien et le mal.
Si des opposés sont voués à être séparés par une ligne rouge infranchissable pourquoi les sexes opposés s’épousent-ils ?
Si de leur union sacrée naît une progéniture… Peut-être ne suis-je que le fruit de l’alliance tout aussi sacrée de la vertu et du vice.
Rien n’est définitivement clair.
Tout n’est que soupçons.
Descartes peut aller se rhabiller. Le doute, en ce qui me concerne du moins, n’est pas la voie de la certitude.
Le doute ne mène qu’à des questions sans réponses.
Soudain, pris dans un rebond de lucidité… Je me surpris en train de penser. Alors que n’a-t-on jamais cessé de me le répéter, pour être heureux il n’est nullement permis de raisonner.
J’arrêtai net le fil de ma pensée et me contentai de chanter les louanges de ce Boukornine unique et toujours apte à m’inspirer.
O Boukornine, unique et grandiose volcan aies pitié de nos âmes perdues.
Prends-nous la pensée et offres-nous la quiétude et la sérénité avec lesquelles tu as pu supporter la chaleur du magma brûlant que tu caches dans tes entrailles depuis tant de siècles.
Parce qu’en moins d’un quart de siècle, la lave de mon cœur ardent m’est bien souvent impossible à endurer.
2 commentaires:
ça fait longtemps que j'ai pas envié quelqu'un, cette fois-ci je le fais.
t'as de la chance mec, j'aurais aimé être à ta place !!!!
joli!!! surtout le sentier sinueux des idées. C'est comme ça qu'on se construit, en forgeant ses propres valeurs, et peu importe dans quel côté elles sont classées. Je suis quand même d'accord avec Descartes car un jour où l'autre non pas que tu trouveras la réponse mais tu choisiras une réponse et tu te diras que sans cette pérégrination "idéologiquo-mystique" au pied de Boukornine tu n'aurais pa pu être l'homme que tu seras.
Casse tous les préjugés, toutes les idées reçues avec "le marteau de la critique"!!!
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